La place du Commando selon monsieur le maire : la « ville-plaisir », au passé oublié et à l'avenir confus
1. Transcription de l'interview du 16 juillet 2018
(>>> Voir ensuite notre commentaire de l’interview, au bas de la page.)
Nous livrons au lecteur, (après la capture d’écran ci-dessous), la transcription complète, effectuée par nos soins, des explications données par David SAMZUN, maire de Saint-Nazaire, lors d'un reportage de la chaîne de télévision Télénantes tourné le 16 juillet 2018.
Le texte introductif (prononcé par un journaliste de Télénantes) de cette interview porte sur la nouvelle vie de la place du Commando, alors que les travaux de transformation viennent de se terminer.
Notre transcription des propos de David Samzun reproduit entièrement ce qu’il a dit dans l'interview, y compris ses hésitations, ses bredouillements, ses phrases incomplètes ou de construction approximative (sans parler de la pauvreté du vocabulaire et du niveau de langue familier). Avant de nous intéresser au fond du problème (dans notre commentaire, ci-après), tout cela est déjà plutôt étonnant et ne dénote pas la clarté de la pensée que l’on attendrait du maire d’une ville de 70 000 habitants ! Ce serait plutôt, comment dire,… un morceau d’anthologie de pauvreté culturelle. Nous encourageons les internautes à lire ces propos de bout en bout, cela « vaut le détour » ! C’est une « belle pépite », pour prendre monsieur le maire à son propre vocabulaire. Ou : la preuve, par soi-même, de la « politique culturelle de haut niveau » de la Ville, dont témoignerait à elle seule la présence d’une « bibliothèque municipale » à proximité de la place du Commando...
Pour ceux qui le souhaitent, l’interview peut être écoutée sur Internet, ICI.
David Samzun, maire de Saint-Nazaire (image Télénantes)
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Journaliste : ... Et pour entrer un peu plus en détail sur cette magnifique place du Commando, je suis en compagnie du maire de Saint-Nazaire. Bonjour, David Samzun !
David Samzun : Bonjour, bienvenue à Saint-Nazaire.
Journaliste : Ben, merci beaucoup de nous accueillir. Alors, ça y est, c’est quasiment terminé. Vous êtes content ?
David Samzun : Eh bien, cette place du Commando que nous avons inaugurée semaine dernière [sic], elle est enfin terminée. C’est plus d’un an et demi de travaux, c’est l’ouverture de certains commerces ; d’autres sont encore à venir, pour la rentrée. Et puis, j’oublie pas celles et ceux qui étaient déjà existants, comme « Les palmiers », derrière, ou quelques restaurants ; et, ce qui fait qu’aujourd’hui c’est devenu, euh, une place, un lieu attractif, où on y trouve, quelle que soit l’heure de la journée ou de la nuit, ben un lieu euh, pour se restaurer euh, y compris euh, pour regarder ses matchs de football.
Journaliste : Donc, finalement, c’est un, un nouvel écosystème qui est en train de, de naître sur Saint-Nazaire.
David Samzun : Ben, vous savez, la place du Commando est quelque part l’aboutissement du côté euh, de ce côté-là de l’aménagement du front de mer. Cet aménagement du front de mer qui a été commencé voilà déjà une dizaine d’années. Je crois que Saint-Nazaire a réussi sa transformation, c’est-à-dire sa reconquête sur la mer. Il reste aussi bien évidemment demain le plateau du Petit Maroc et les bords de Loire. Et donc, la place du Commando, c’est aussi le lieu qui nous permet de dire ‘Il se passe quelque chose, ici’. Alors, il y a plein d’animations, dans la ville, dans l’hyper-centre ; mais il n’y a pas de densité d’offre, et, l’enjeu, c’est une ville de bord de mer, une ville pour l’ensemble des Nazairiens, celles et ceux qui vivent ici tout au long de l’année, mais aussi un lieu pour accueillir celles et ceux qui viennent nous visiter. Et vous le savez, Place du Commando, cette plage, lorsque la mer est haute, beaucoup de gens se baignent aujourd’hui, ce qui n’était pas le cas voilà quelques, quelques mois, quelques années. Et puis derrière nous, à la porte du centre-ville, demain, un port de plaisance. Donc on sent bien que, vous avez raison, c’est un écosystème, une ville, Saint-Nazaire-sur-Mer, une ville de bord de mer, une ville centre aussi de cette façade atlantique, de cette métropole. Eh bien, écoutez, euh, Saint-Nazaire est en train de prendre son destin en main ; c’est-à-dire, c’est une ville industrielle, on en est fiers, mais c’est aussi une ville de destination touristique.
Journaliste : A la reconquête de la mer, à la reconquête du front de mer... Est-ce que vous pensez que, finalement, les Nazairiens avaient oublié qu’ils avaient ce potentiel euh, en face d’eux ?
David Samzun : Ben ils l’avaient oublié, voilà une dizaine d’années. Mais lorsque nous avons commencé les premiers aménagements euh, du front de mer euh, sous Joël Batteux – j’étais son adjoint à l’urbanisme –, on a vu cette transformation ; on a vu, quel que soit le jour, le mois de l’année, des hommes et des femmes, des enfants, euh, des jeunes, des anciens, bref, tout le monde se réapproprier le front de mer, et découvrir qu’il y avait une baie à Saint-Nazaire, et qu’il y avait la mer ; et c’est l’aménagement du front de mer. La place du Commando, elle vient, j’ai envie de dire, finir l’aménagement de cette baie. Demain, je vous l’ai dit, plateau du Petit Maroc, bord de Loire, avec aussi, cette industrie, ces énergies marines renouvelables, qui vont euh, être embarquées. Et puis, de l’autre côté, on a un chemin douanier ; il nous faudra faire la liaison de la plage Villès-Martin, où là aussi, on a quelques belles pépites. En fait, la réalité, on pourrait partir d’ici et aller jusqu’à la plage de Pornichet, à pied, en mode doux ; c’est très, très agréable.
Journaliste : Mais oui, alors, quand même, y a Pornichet, y a La Baule un peu plus loin, certes, mais aujourd’hui, si on veut faire la fête, c’est quand même à Saint-Nazaire.
David Samzun : A Saint-Nazaire, j’vais vous dire, Saint-Nazaire n’est pas une station balnéaire, et je ne le souhaite pas. Saint-Nazaire est une ville, c’est-à-dire, elle fonctionne 365 jours sur 365 jours. Notre enjeu, sur la place du Commando, c’est qu’elle fonctionne, l’été, je n’ai aucun doute, bien évidemment, mais qu’elle fonctionne aussi en plein hiver, et la conception des cellules aujourd’hui euh, c’est-à-dire de ces restaurants, de ces bars, c’est qu’on y soit bien l’été avec ces terrasses extrêmement généreuses, ces espaces publics, mais aussi, lorsqu’il y aura quelques tempêtes. Et puis enfin, ce lieu, il doit être animé. Voilà pourquoi, et je l’assume, tout ne peut pas venir de la Ville de Saint-Nazaire, y compris euh, pour des raisons de moyens, mais aussi, celles et ceux qui sont porteurs de projets, celles et ceux qui grattent de la guitare, celles et ceux qui caricaturent, bref, toutes celles et ceux qui veulent animer ce front de mer sont les bienvenus. Et vous l’avez vu euh, juste derrière ces jeux en bois, ces, ces espaces pour nos jeunes, eh bien, on a une bibliothèque municipale. Et donc c’est lié aussi au plaisir de ville, que j’appelle le ‘plaisir de vivre dans une ville’, et puis aussi euh, une politique culturelle de haut niveau.
Journaliste : Les ambitions pour demain, est-ce que, elles se situent aussi au niveau de la base sous-marine ?
David Samzun : Ben la base sous-marine, dès septembre, nous inaugurerons, mais courant de l’été déjà, le transfert de la salle Jacques Brel dans la base sous-marine, qu’on appelle ‘l’alvéole douze’ ; c’est une salle festive, une salle associative. Il y a toujours en cours, les études pour l’aménagement d’un projet de port urbain ; c’est-à-dire un port de plaisance d’une centaine, cent, cent vingt anneaux, qui vont se retrouver en proximité du centre-ville ; parce que notre fondement de l’ensemble de ces aménagements, c’est bien sûr ‘plaisir de ville’, ‘plaisir de vivre à Saint-Nazaire’, et c’est la liaison entre notre bord de mer et son centre-ville. Et donc, la base sous-marine, le port de plaisance, le théâtre, Cinéville, l’ensemble des aménagements au sein de la base sous-marine doivent être la liaison avec notre centre commerçant. Et puis, enfin, la réflexion que je présenterai euh, d’ici quelques mois euh, sur l’ensemble du plateau du Petit Maroc, mais aussi, éventuellement, accueil de paquebots juste derrière nous, au pied des jetées. Bref, les projets ne manquent pas, la dynamique est là, et puis une situation industrielle économique qui nous permet, justement, de prendre un peu plus de risques que prévu.
2. Commentaire de l’interview : l'oubli du passé et la médiocrité du présent
La place du « Commando » n’existe pas
Les propos de David Samzun soulignent clairement la volonté, de la part des autorités municipales, de présenter la place du Commando comme un lieu consacré exclusivement aux loisirs, et donc de passer sous silence sa vocation de lieu de mémoire – en lien avec le nom de la place. Lorsque le maire de Saint-Nazaire opère un retour sur le passé, un retour sur les quelque treize années précédentes, il parle uniquement d’une part des transformations, la part qu’il veut mettre en valeur, parce qu’elle n’a pas soulevé de polémique, à savoir, le remodelage du front de mer, successivement depuis 2005, depuis la plage de Villès-Martin jusqu’à un secteur proche de la place du Commando ; parce que ce qui existait auparavant (un muret de pierres, des arbres à l’ombre généreuse) peut être implicitement mis en balance, sans poser de problèmes majeurs aux téléspectateurs, avec ce qui a été voulu désormais par cette équipe municipale et la précédente (garde-corps de métal, surface dallée ou cimentée, beaucoup moins d’arbres, et des palmiers…).
En revanche, et de façon scandaleuse, le maire de Saint-Nazaire ne dit pas un mot dans cette interview sur ce qui existait auparavant, jusqu’en 2015, en bordure de mer, place du Commando ! Les responsables municipaux se sont passé le mot, et la ligne officielle pour la communication externe est claire, comme nous l’avons déjà vu à travers l’interview du directeur de la SONADEV au mois de janvier précédent : on ne parle surtout pas de l’existence à cet endroit, il y a quelques années encore, de l’ensemble commémoratif d’une opération militaire majeure de la Seconde Guerre mondiale qui a joué un rôle déterminant dans son issue (l’opération Chariot) ; où le commando britannique dont la place porte le nom a sacrifié nombre de ses soldats. Parce que le déplacement et le démantèlement de ces monuments commémoratifs a fait polémique, qu’il s’est fait sans concertation avec les Nazairiens sur le projet final, et qu’il ternit assurément l’image de la Ville.
En conséquence, le téléspectateur peut toujours se demander d'où cette place dite du Commando tire son nom. La réponse n’est pas venue de cette interview de M. Samzun. Le blocage de la Ville sur ce thème est total.
Front de mer, mon beau front de mer,… quel est le plus beau ?
A propos du long front de mer, qui attirerait davantage les Nazairiens depuis qu’il a été transformé, par portions successives, à partir de 2005, voilà une belle affirmation gratuite ! Où sont les statistiques du nombre de promeneurs sur le front de mer au fil des samedis ou des dimanches de l’année ? Où sont les photographies du front de mer un dimanche après-midi vers telle année (avant 2005), à comparer avec des photographies des promeneurs sur le front de mer aujourd’hui ? Où sont les sondages auprès des Nazairiens pour savoir s’ils ont changé leurs habitudes de vie, et s’ils fréquentent davantage le front de mer depuis que le muret de pierres a disparu, depuis que le chemin le long de la mer a été quasi entièrement bétonné, depuis que l’ombre est plus rare ? depuis que l’équipe municipale a confondu un bord de mer de façade atlantique nord de la France, avec une façade méditerranéenne, en plantant des palmiers qui n’ont pas grand chose à voir avec l’équilibre naturel de la région ?
En réalité, qu’ils apprécient, ou pas, ces transformations, les Nazairiens fréquentent aujourd’hui le front de mer, comme ils le fréquentaient hier, parce que c’est un front de mer, et qu’un front de mer, quels que soient les réaménagements, garde un agrément certain. Les Nazairiens se sont toujours promenés sur le front de mer entre la place du Commando et la plage de Villès-Martin, et il y avait foule, les jours fériés, les samedis, les dimanches, et les « joggeurs » étaient également nombreux, aussi loin que remontent nos souvenirs personnels, c’est-à-dire sur plusieurs dizaines d’années – et M. Samzun, né en 1970, est d’une génération qui lui permet de s’en souvenir également.
Mais les responsables municipaux, dans leur volonté de faire accepter sans broncher toutes leurs transformations mues avant tout par l’idéologie, n’ont pas de plus pressé désir que de faire disparaître de la mémoire des Nazairiens, en l’espèce, ce qui existait auparavant le long de la mer : le muret de pierres sur lequel il faisait bon s’asseoir en toute tranquillité et intimité, où l’on voulait, quand les bancs étaient occupés ; les deux rangées de beaux et grands arbres à l’ombre généreuse ; le sol sablonneux entre les arbres, bien plus adapté que le béton pour la course à pied… S’il faut faire oublier le plus vite possible qu’il y avait aussi un front de mer « avant », que les promeneurs y étaient tout aussi nombreux que maintenant, et que de nombreux Nazairiens peuvent avoir préféré l’ancien aménagement, c’est également parce que les travaux de transformation de ce front de mer ont coûté… 17 millions d’euros ! Or, quel est le moyen infaillible de favoriser l’oubli le plus rapide ? Ne pas en parler, faire comme si cela n’avait jamais existé. Et réécrire le passé, en prétendant, sans preuve, que les Nazairiens pensent que c’est mieux maintenant. Ce sont des méthodes classiques du totalitarisme.
Silence sur l’opposition de Natur-Action au massacre des arbres sur le front de mer et place du Commando
En fait, la transformation du front de mer ne s’est pas faite sans susciter de vives oppositions, ce que tait le discours officiel : lors de chaque tranche des travaux, « Natur-Action », association de défense des paysages naturels à Saint-Nazaire, a dénoncé l’abattage massif de grands et beaux arbres de la région, à l’ombre bienvenue, pour les remplacer par des pins et palmiers peu adaptés à la région, qui donnent peu d’ombre ; l’association a aussi dénoncé la destruction du muret de pierres du front de mer. Le contraste est saisissant entre les articles de presse relatant ces oppositions, et le discours irénique de monsieur le maire sur Télénantes le 16 juillet 2018.
En 2005, lors de la première tranche des travaux, sur la portion de front de mer allant de Sautron à Villès-Martin, ce sont 91 arbres sur 143 qui ont été abattus, des ormes, des hêtres, des frênes, dont une quinzaine d’ormes centenaires ; voir ICI l’indignation de Natur-Action dans un article de Presse Océan du 12 avril 2005 ; et ICI dans un article de Ouest-France du même jour. On y lit que des militants déploraient aussi la destruction du muret du front de mer, « qui servait d’assise à de nombreux promeneurs ». La presse s’est fait le relais des mêmes critiques de nombreux Nazairiens lors d’une marche de protestation, fin avril de la même année, contre le massacre des arbres et la destruction du muret du front de mer, qui aurait eu lieu sans concertation des Nazairiens – voir les articles de Ouest-France ICI et de Presse Océan ICI. Mais le mal était fait, la mairie avait abattu la centaine d’arbres et détruit le muret sans états d’âme.
En 2009, la deuxième tranche des travaux a inclus l’abattage de presque tous les platanes (une centaine) sur le reste du front de mer, d’ouest en est, depuis le rond-point de Sautron jusqu’au jardin des Plantes, puis jusqu’à la place Franklin Roosevelt ; et ce, au profit de quelques palmiers, pins et arbustes. Voir l’indignation de Natur-Action dans un article de L’Echo de la Presqu’île du 30 janvier 2009, ICI, et dans un article de Ouest-France du 9 février 2009, ICI.
La mairie n’a tenu aucun compte des critiques de Natur-Action, et a continué ses abattages comme un rouleau compresseur. Les méthodes totalitaires de la mairie pour couper court à toute critique ou opposition possibles, méthodes résumées par Natur-Action sur une page de son site Internet (consultée le 25 mars 2019), méritent d’être recopiées ici ; c’est édifiant (nous avons mis en gras le passage-clef) :
« En janvier 2009, la seconde tranche de l'aménagement du front de mer est lancée. Pour éviter que Natur-Action n'intervienne, le chantier est bouclé par des barrières et une vingtaine de personnes s'activent à couper plus de 150 platanes en moins de 3 heures un lundi matin d'hiver. Les souches sont immédiatement enlevées, les branches broyées. Tout doit disparaître en moins de 24 heures ! Des platanes centenaires (entre le monument américain et l'avenue Léon Blum) sont abattus alors qu'il y avait l'opportunité de créer un agréable mail ombragé avec bancs, terrasses, kiosque, jeux... Raté ! Le square du 19 mars 1962 voit lui aussi une grande partie de ses arbres disparaître sans ménagement, dont la totalité des grands peupliers. On nous annonce vouloir “dégager la vue” mais en 2012 coup de théâtre, la ville veut y implanter un skate-park. Bravo pour la fameuse vue dégagée. »
Encore une fois, la mairie s’est donc signalée par sa volonté farouche de « bétonner » la ville de façon autoritaire (en l’occurrence, une partie du parc paysager ! le poumon vert de la ville, un endroit naturel « sacré » ! un vaste espace vert auquel les Nazairiens sont très attachés). Il s’agissait bien sûr déjà, comme ce serait le cas pour le déplacement précipité du monument aux morts de la place du Commando en 2017, de mettre les Nazairiens devant le fait accompli, pour couper court à toute critique, comme d’habitude de la part de la mairie. Même Natur-Action n’était pas au courant, en 2009, que la mairie avait le projet de bétonner cette portion du parc paysager de la ville, face à la mer.
Enfin, concernant la « troisième tranche » des travaux du front de mer (la place du Commando), Natur-Action a dénoncé l’abattage de trop de platanes, sans résultat évidemment.
« j’vais vous dire, Saint-Nazaire n’est pas une station balnéaire… »
Ce passage est l’un des plus beaux morceaux de confusion de la pensée de cette interview. Las ! C’est aussi ce que monsieur le maire pense être un des plus intelligents passages explicatifs de sa conception de la ville de Saint-Nazaire. Il vient de nous dire que « l’enjeu, c’est une ville de bord de mer » ; que Saint-Nazaire doit aussi être « un lieu pour accueillir celles et ceux qui viennent nous visiter » ; avec sa maîtrise sans pareille de la langue française, il vient d’ajouter que « cette plage, lorsque la mer est haute, beaucoup de gens se baignent aujourd’hui » ; enfin, le maire voit dans sa ville, « demain, un port de plaisance » ; et il résume tout cela d’une formule lumineuse qui semble être venue spontanément, « Saint-Nazaire-sur-Mer », en ajoutant que c’est aussi une « ville de destination touristique ». Puis, tout à coup, on apprend le fin mot de tout cela : « A Saint-Nazaire, j’vais vous dire, Saint-Nazaire n’est pas une station balnéaire, et je ne le souhaite pas. » (!). Le téléspectateur a de quoi être troublé.
Mais David Samzun est aussi sûr de lui qu’une locomotive sur une ligne droite, et il assume sa définition d’une ville qui « n’est pas une station balnéaire », tout en étant au bord de la mer, tout en voyant les gens se baigner sur ses plages, tout en étant une destination touristique, tout en ayant bientôt un port de plaisance : c’est une ville qui « fonctionne » 365 jours par année. Doit-on être rassuré de l’assurance de notre maire, qui nous guide vers notre avenir, ou inquiet d’une certaine confusion de la pensée ? Le Petit Robert n’était sans doute pas assez précis, mais heureusement, David Samzun l’a complété (réf. - Le nouveau Petit Robert de la langue française, éd. 2009, article « balnéaire », adj. : « Relatif aux bains de mer – station balnéaire »).
Enfin, comment cette place du Commando, nouveau modèle, pourra-t-elle être le symbole d’une ville « pour l’ensemble des Nazairiens », comme David Samzun l’appelle de ses vœux, alors même que les tarifs des bars et restaurants ont été jugés « trop élevés » par les consommateurs, ce que la presse quotidienne a avoué en ce même mois de juillet 2018 ?
Ce qui reste : la médiocrité
Bref, derrière la médiocrité de l'expression et la confusion de la pensée se cachent un détournement et un rejet du passé. La minéralisation de la place du Commando, l'éparpillement de ses monuments commémoratifs et l'arrachage de ses arbres symbolisent une volonté de faire table rase de l'Histoire d'une ville, pour pouvoir plus facilement contrôler son avenir.